Trilogie documentaire sur les évangéliques

« Les évangéliques à la conquête du monde ».

Le titre est accrocheur et bien de nature à chatouiller la fibre anticléricale, voire anti-américaine de bon nombre de français. Et que dire des sous-titres des trois volets de ce documentaire (dans l’ordre) : « La grande croisade », « Les évangéliques au pouvoir », « Dieu au-dessus de tout ».

Creusez les tranchées, sortez l’artillerie … pour contrer « la success story évangélique, planétaire, morale et financière » !

L’article du journal « Réforme » (questions posées à Philippe Gonzalez, l’un des auteurs dud ocumentaire) m’avait pourtant plutôt rassuré : « une enquête minutieuse … qui ne relève ni du brûlot antireligieux, ni de la vision condescendante d’un évangélisme par nature exotique ». Je demandais à voir … et j’ai vu pendant trois heures une description quasi-complotiste des évangéliques américains ! Ainsi l’évangéliste Billy-Graham est présenté comme inféodé au pouvoir politique, malgré les protestations de sa petite fille. A ce titre, je trouve vraiment peu honnête le passage, sans transition aucune, de l’image de Billy Graham aux images de la guerre au Vietnam … à croire que l’évangéliste y a été personnellement pour quelque chose !

Bien-sûr, la politisation et l’instrumentalisation d’une partie de l’évangélisme américain sont bien réelles. Un évangélisme fondamentaliste, dans lequel je ne me reconnais absolument pas : créationniste, conservateur, moraliste, voire même raciste.

De là à considérer l’église évangélique comme un seul bloc, né aux Etats-Unis, qui à coups de pétrodollars serait à l’origine de l’évangélisme mondial, il n’y a qu’un pas. Un pas allègrement franchi par les auteurs du documentaire, faute de clarification.

Je ne suis pas du tout sûr que ce documentaire alarmiste donnera du grain à moudre, j’entends du « bon » grain à un public peu familier de l’évangélisme. Combien auront eu le courage (et l’intérêt) de regarder les trois documentaires ? Ce n’est pourtant seulement qu’à partir du milieu du troisième volets que des voix (évangéliques et américaines !) se font vraiment entendre pour mettre un bémol et signifier que tous ne sont pas du même bord.

Finalement, ce documentaire véhicule une image faussée et caricaturale du monde évangélique et ne rend pas compte de la diversité de ses courants. Être « évangélique », c’est d’abord appartenir à une « sensibilité chrétienne », une sensibilité qui traverse aussi bon nombre de confessions chrétiennes.

La Fédération protestante de France a dénoncé elle aussi « un parti-pris éditorial qui créé un amalgame choquant entre l’évangélisme américain nationaliste et les évangéliques français ».

Pour aider à situer la mouvance évangélique, je recommande la lecture du carnet « Raconte-moi l’Eglise » d’Eddy Nisus, Ed. Croire & Lire (Evangélique), ainsi que « Les évangéliques » de Michel Mallèvre, Ed. Fidélité (Catholique). Deux petits livres (1) qui soulignent le dynamisme et l’attractivité des églises évangéliques, tout en relevant les dangers et dérives qui les guettent.

(1) Que la librairie Onésime à Dunkerque se fera un plaisir de vous procurer


  • José Frédérick

Print your tickets